L’objectif des Yeux de l’Ouïe, quant à la programmation, est de privilégier les œuvres rendant compte d’une démarche ou d’une écriture originale, et surtout de présenter des formes audiovisuelles moins familières, plus rarement diffusées par les médias grand public. Ces diffusions ont pour but d’introduire le plus large public dans des univers sonores et visuels rares, de montrer que l’on peut être spectateur autrement grâce à un dispositif ouvert et convivial et de susciter des rencontres, d’inviter les artistes, afin d’interroger, d’accompagner et de révéler le potentiel critique de chaque spectateur. Parallèlement à l’organisation d’une manifestation annuelle « Les Yeux la Nuit », nuit vidéo qui se déroule au mois de juin, Les Yeux de l’Ouïe favorise les rendez-vous réguliers afin de diversifier les programmations et de fidéliser le public le plus large.
Projection/débat sur le thème du formatage des documentaires
avec la diffusion de deux versions du même film : la version de la réalisatrice et la version formatée par la production.
Si toi aussi tu m’abandonnes de Françoise Romand
En 2003, Françoise Romand réalise un film pour France 3 sur un enfant adopté en Colombie à l’âge de 8 ans, qui devient violent à l’adolescence contre sa famille d’adoption. Le film explore le point de vue du jeune homme (22 ans), la famille ne souhaitant pas intervenir dans le film.
FR3 et le producteur Serge Moati décident à la projection finale du montage de supprimer des séquences, d’introduire un commentaire et d’ajouter des interviews de spécialistes. Le documentaire intime sur José, sur son histoire du point de vue de l’adopté ne sied pas aux instances. Françoise Romand refuse ces changements. Ils embauchent une autre réalisatrice pour reprendre le travail.
S’en suit un procès de 2 ans à l’issue duquel la justice condamne « Image et Compagnie » (Serge Moati) à payer des dommages et intérêts à Françoise Romand et interdit la diffusion du film remanié. Qu’à cela ne tienne, ils concoctent une troisième version qui est diffusée.
“Si on regarde les deux versions, on a une démonstration éblouissante du formatage des documentaires dont nous sommes tous victimes, auteurs et spectateurs.” F. Romand